BÉNIN
PRÉSENTATION DU PAYS
Superficie : 114 764 km2
Population : 13 301 694 habitants
Principaux secteurs économiques : agriculture, élevage, pêche maritime et tourisme
Principaux écosystèmes : forêts, savanes, montagnes semi-arides, plaines côtières
LISTE DES PARTICIPANTS
- Pr. Achille ASSOGBADJO, Université d’Abomey-Calavi | assogbadjo@gmail.com
- Pr. Chabi Sylvestre DJAGOUN, Laboratoire d'Ecologie Appliquée, Université d'Abomey - Calavi | sylvestre.djagoun@fsa.uac.bj; dchabi@gmail.com
- M. Cossi G. Raoul NOUMONVI, Direction Générale des Eaux, Forêts et Chasse, Ministère du Cadre de Vie et Développement Durable | noumonviraoul@gmail.com
- Colonel Emmanuel GBEDJI, Direction Générale des Eaux, Forêts et Chasse, Ministère du Cadre de Vie et Développement Durable | gbedjimanu@gmail.com
- Mme Chrystelle DAKPOGAN HOUNGBEDJI, Organisation pour le Développement Durable et la Biodiversité (ODDB) ONG | chrystelledak@gmail.com
- M. Appolinaire OUSSOU LIO, Groupe de Recherche et d'Action pour le Bien-Etre au Benin (GRABE-Benin) | aoussoulio@gmail.com
Les espèces exotiques envahissantes sont considérées comme l’une des causes les plus importantes de la perte de la biodiversité au Bénin. Parmi les principales espèces envahissantes au Bénin on retrouve : Eichhornia crassipes communément appelée « jacinthe d’eau » dans les zones humides du sud Bénin ; Chromolaena odorata dans la partie guinéenne et soudano-guinéenne ; Imperata cylindrica et striga sp dans la zone soudano-guinéenne et soudanienne et Hyptis suaveolens sur toute l’étendue du territoire.
Les enjeux inhérents aux espèces exotiques envahissantes au Bénin sont importants et diversifiés. Les invasions engendrent autant des dommages environnementaux, que socio-économiques.
L’invasion de jacinthe d’eau (Eichhornia crassipes) est l’une des problématiques liées aux plantes exotiques envahissantes les plus importantes au Bénin. L’espèce envahit les plans d’eau du fleuve Ouémé qui est la principale source d’eau du Bénin. Par son action la jacinthe d’eau y affecte la diversité de la faune halieutique et impacte directement la sécurité alimentaire. La pourriture de la jacinthe d’eau sur le lac Nokoué entraine des dommages socio-économiques importants pour les activités de pisciculture, de pêche par la baisse de la production halieutique, de cultures vivrières et maraîchères de la vallée de l’Ouémé et de production rizicole.
L’invasion de l’ivraie Siam (Chromolaena odorata) est une menace pour l’agriculture, l’élevage et la biodiversité au Bénin. L’abondance de cette espèce exotique envahissante a été récemment confirmé dans les cultures de noix de cajou au Bénin, ce qui pourrait occasionner des pertes économiques importantes. La présence de l’espèce est également signalée dans certaines aires protégées et limiterait les actions de restauration des écosystèmes.
La menace que représente le Mesosphaerum suaveolens (L.) Kuntze, Lamiaceae, pour les activités agricoles et pastorales ainsi que pour la biodiversité indigène au Bénin est également documentée. L’espèce réduit la production fourragère, et par son invasion accroit les coûts de production pour les agriculteurs. L’espèce s’installe et entrave la germination d’espèces indigènes, entrainant une raréfaction de ces espèces sauvages indigènes. Cette espèce, déjà largement répandue au Bénin et en Afrique subsaharienne, devrait s'étendre sous l'influence du changement climatique.
Les menaces de certaines espèces exotiques envahissantes sur la biodiversité et les risques sur le développement de l’écotourisme au Bénin, ont été mise en lumière. Le Lantana camara (verbenaceae), dont l’impact est considéré très néfaste sur les espèces natives, pourrait se propager sur 65 % de la réserve de biosphère de Pendjari, le plus important sanctuaire de faune sauvage du Bénin. D’autres aires protégées ont également des habitats favorables à l’espèce. L’identification de ces sites à haut risque d’invasion pour certaines espèces, devrait guider les réponses à apporter en termes d’actions préventives.
Les espèces exotiques envahissantes étant de nature des espèces très compétitrices, elles menacent les espèces sauvages locales et contraignent les populations locales à modifier leur mode de vie et à s’adapter. C’est le cas de l’introduction du poisson-chat au Bénin qui se multiplient rapidement et crée des déséquilibres au sein des écosystèmes aquatiques au détriment d’espèces de poisson locales, utilitaires pour les populations locales.
Au Bénin, la biodiversité forestière est capitale pour les ménages tant ruraux qu’urbains, vu que des communautés entières sont dépendantes des forêts et de leurs produits pour leurs besoins (denrées alimentaires, médicaments, bois de feu, matériaux de construction, etc.). La pêche fait vivre plus de 300.000 personnes (hommes et femmes) et les poissons fournissent environ 50% des ressources en protéines animales du pays. Les différents types d’écosystèmes et partant la biodiversité continue de se dégrader au Bénin, du fait de pratiques non durables notamment la coupe non contrôlée de bois, les feux de brousse incontrôlés, la destruction des frayères naturelles (coupe des mangroves pour bois de cuisson domestique et production artisanale du sel), l’utilisation de filets de pêche à maille non réglementée, etc.
Le Bénin est doté de nombreux textes réglementaires qui représentent des cadres propices pour le contrôle des espèces exotiques envahissantes et l’utilisation durable des espèces sauvages. On peut citer entre autres, La loi-cadre sur l’environnement, le code forestier pour la gestion durable des ressources forestières, le décret sur la gestion de la biodiversité, la Stratégie pour la valorisation de la biodiversité via les PFNL, la Stratégie nationale sur la diversité biologique, etc. Au niveau de la stratégie et plan d’actions pour la biodiversité 2011-2020, il est prévu comme objectif stratégique 8 de « mettre en place des mesures pour empêcher l’introduction et l’établissement des espèces exotiques envahissantes » pour aboutir à un cadre fonctionnel d’évaluation et de gestion des risques d’introduction des espèces exotiques envahissantes. L’objectif 12 de ce plan vise à « préserver la diversité génétique des plantes cultivées, des animaux d’élevage et domestiques et des parents sauvages ».
A la pratique, l’opérationnalité de ces stratégies nationales reste limitée. Une des raisons serait non seulement la pluralité des institutions en charge de l’environnement et la faible synergie d’actions entre ces institutions. La faible synergie d’actions entre la sphère politique et la recherche scientifique expliquerait également cette faible opérationnalité des actions sur le terrain.
Les pistes pour l’opérationnalisation de solution inclusive et efficiente sont diverses :
La disposition d’un état des lieux sur les différentes espèces exotiques envahissantes, ainsi que des évidences sur leurs impacts socio-économiques effectifs ou potentiels.
L’implication des populations qui sont au contact de ces espèces sauvages et/ou espèces exotiques envahissantes dans la prise de décision, dans l'élaboration des stratégies et leur mise en œuvre est important.
La priorisation de sites stratégiques, avec des écosystèmes naturels, refuge d'une grande diversité à haut risque d’invasion est nécessaire.
La priorisation de la lutte biologique qui est la solution à long terme, la moins coûteuse et la plus respectueuse de l'environnement.
La régionalisation des stratégies, vu que les enjeux sont extraterritoriaux.
Les bonnes pratiques pour le contrôle des espèces exotiques envahissantes et la gestion durable des ressources naturelles proviennent pour l’essentiel d’initiatives privées et/ou des projets spécifiques et non d’envergure nationale.
Valorisation économique de la jacinthe d’eau par l’ONG JEVEV au Bénin- Cas d’adaptation inclusif aux espèces aquatiques envahissantes
L’implication d’acteurs non étatiques au Bénin pour la lutte contre les espèces exotiques envahissantes au Bénin est un cas intéressant à documenter. L’ONG Jeunesse et Emplois Verts pour une Economie Verte (JEVEV) a entrepris de lutter contre la Jacinthe d’eau au Bénin. Cette ONG contribue à stopper l’invasion de l’espèce par le développement d’actions de ramassage par les populations riveraines. L’ONG JEVEV a également mis en place une filière économique de valorisation durable des jacinthes à travers le compostage en aérobiose. Ce compost est bénéfique pour l’agriculture locale (l’horticulture et le maraichage) et permet de générer des revenus pour les populations impliquées. Les activités de l’ONG JEVEV engendrent donc des co-bénéfices à la fois environnementaux par le contrôle de l’invasion de cette espèce exotique envahissante, et économiques, vu que la Jacinthe d’eau devient une ressource pour l’agriculture locale. Un des défis pour cette ONG demeure la capacité de prélèvement par rapport à la ressource disponible. Il faudrait donc pouvoir renforcer les actions de cette ONG pour une action plus efficace.
Le système traditionnel d'aquaculture Whedo dans le nord du Bénin - Cas de mobilisation de savoir et pratique traditionnelle pour une pêche durable
La pêche régionale est une activité traditionnelle importante, mais on assiste à un déclin de la diversité des poissons locaux, de leur quantité et de leur taille. Les raisons : une pression de pêche croissante associée à l'utilisation de méthodes de pêche désastreuses, causée par la demande croissante d'une population en forte croissance, ainsi que la destruction des zones de frai en raison de l'absence d'approches intégrées de la gestion des plaines inondables. Ainsi : Les pêcheurs et les agriculteurs ont donc commencé à élever des poissons dans des whedos (étangs creusés dans la plaine inondable des principaux cours d'eau).
Une pratique traditionnelle d'élevage de poissons dans la vallée de l'Ouémé au sud du Bénin,
Les whedos, appelés "Tschifi dai" ("trou à poisson" dans la langue locale dendi) dans le nord, diffèrent considérablement de ceux du sud du Bénin.
Pour faire face aux conséquences économiques et écologiques de la baisse des stocks, les pêcheurs utilisent la méthode traditionnelle du whedo d'ILK, une aquaculture durable qui s'appuie entièrement sur les espèces locales.
La gestion de la Forêt classée de la LAMA - une approche réussie avec des co-bénéfices multiples pour la conservation de ressources forestières, l’exploitation forestière durable et la création de bénéfices pour les populations locales
Face à la dégradation des écosystèmes forestiers et de la perte de la diversité biologique au sein des écosystèmes de la LAMA qui était infiltré et occupé par des parcelles agricoles, un modèle de restauration des écosystèmes et de gestion durable des ressources forestières a été mis en œuvre. Dans ce modèle l’espace a été délimité autour d’un noyau central avec une grande diversité biologique intégralement protégé d’environ 4800 ha. Ce noyau central a été ceinturé de 11ha de plantations d’espèces de bois (Tech et de Melina), avec un objectif d’exploitation durable de la ressource en bois pour la commercialisation. Le troisième secteur concerne les zones de cultures et d’habitation vers lesquelles les populations ont été déplacées et recasées. Ce schéma de gestion a été possible grâce à la coopération allemande qui a consenti un financement de long terme, sur 20 ans. L’exploitation du bois des plantations, selon un modèle durable a permis un retour sur investissement dès la 15ème année. Les retombées sont importantes pour les communautés locales en termes de bois de chauffe pour faire du charbon, et en termes de ristourne sur les ventes de bois ; toute chose qui crée une incitation réelle pour la conservation de cette forêt classée. La forêt classée de la Lama constitue aujourd’hui une réserve naturelle unique par son étendue, son originalité et sa grande diversité. Elle constitue le dernier grand vestige de forêt naturelle dans cette zone du Bénin.La forêt classée de la Lama est gérée par l’Office National du Bois (ONAB) de la République du Bénin. Ce modèle met en évidence le besoin de financement de long terme dans le cadre de projet de gestion durable de ressources forestières.