SÉNÉGAL

PRÉSENTATION DU PAYS

Superficie : 196 722 km2

Population : 18 032 473 habitants

Principaux secteurs économiques : agriculture, exploitation minière, tourisme et pêche

Principaux écosystèmes : écosystèmes fluviaux et lacustres, écosystèmes marins, écosystème subguinéen, zones arides et semi-arides

LISTE DES PARTICIPANTS

  • Pr. Khady DIOUF GOUDIABY, Institut Fondamental d'Afrique noire Cheikh Anta Diop/ Université Cheikh Anta Diop de Dakar | khady1.diouf@ucad.edu.sn
  • Pr. Lamine KANE, Ministère de l'Environnement et de la Transition Ecologique | kanelamine1969@gmail.com
  • M. Mamadou MBAYE, Réseau des Organisations pour la protections des écosystèmes de Mangroves dans le Bas Delta du Fleuve Sénégal (ROPEM/DFS) | imbaye974@gmail.com
  • M. Mamadou NDIAYE, Direction des Aires Marines Communautaires Protégées, Ministère de l'Environnement et du Développement Durable | ndiayemd@yahoo.fr
  • Pr. Sérigne Modou SARR, Institut supérieur de formation agricole et rurale/Université Alioune Diop | sarmodou@yahoo.fr
  • M. Djiby SEYE, Réseau d'Appui à la Conservation et aux Initiatives de Développement Durable (RACIDD) | seyedjoudj20@yahoo.fr

Le Sénégal, pays d’Afrique de l’Ouest est un pays dont la diversité des écosystèmes portent l’économie nationale. En effet, les deux principales sources de devises du pays sont l’Agriculture, la pêche et le secteur touristique.

Le secteur touristique bénéficie de la biodiversité et de la diversité des écosystèmes, quand la pêche est favorisée par le réseau hydrographique dense et un littoral sur 700km de côtes.

Les problématiques liées aux espèces exotiques envahissantes et l’utilisation non durable des espèces sauvages, menace cette biodiversité, support du développement économique du pays.

Les enjeux liés aux espèces exotiques envahissantes au Sénégal se concentrent autour de 4 espèces : 2 espèces de roseaux (Typha australis, Phragmites vulgaris), la Laitue d’eau (Pistia stratiotes) et la Fougère d’eau (Salvinia molesta).  Typha australis en termes de superficie et de d’invasion est cependant l’espèce la plus problématique qui sévit dans la zone du delta du fleuve Sénégal qui compte plusieurs aires protégées (Aires Marines Protégées, Parcs nationaux, Réserves de faune et réserve naturelle) dont une réserve de Biosphère transfrontalière entre le Sénégal et la Mauritanie qui couvre une superficie de 641 768 hectares du delta du fleuve Sénégal.

L’introduction et la prolifération de certaines des espèces exotiques envahissantes a été favorisé au Sénégal par la construction des barrages anti-sel de Diama et hydroélectrique de Manantali et la perturbation des écosystèmes aquatiques (empêchement de la remontée des eaux salées dans le delta) qui s’en est suivie.

Les impacts inhérents à l’invasion des espèces exotiques envahissantes sont importants, tant sur le plan écologique que socio-économique.  Le Typha (Typha australis) par exemple est une espèce très compétitive qui empêche le développement des autres espèces, modifiant ainsi la biodiversité. Sur le plan économique, la région Nord du pays où se développe en abondance l’espèce envahissante est une zone agro-sylvo-pastorale importante qui concentre entre autres 90% de la production rizicole du pays. Le Typha envahit les parcelles rizicoles, réduit les périmètres rizicoles et par conséquent impacte la production rizicole. La présence de l’espèce entraine la prolifération de parasites (douve du foie) pour le bétail, et réduit les accès du bétail aux ressources en eau. Au niveau de la santé humaine, l’espèce rend l’eau impropre à la consommation et est le support de larves de moustiques (hausse de l’incidence du paludisme) et de maladies liées à l’eau (bilharziose). La présence de l’espèce sur le lac de Guiers qui est le plus grand réservoir d’eau douce de surface du Sénégal, représente un véritable enjeu en termes d’approvisionnement en eau potable pour les populations. En somme le développement des espèces exotiques envahissantes a des incidences négatives sur le mode de vie des populations et leurs activités économiques.

En ce qui concerne l’utilisation durable des espèces sauvages, un enjeu important pour le Sénégal concerne l’épuisement des ressources halieutiques et les pratiques de pêche non durable, bien que la surexploitation du bois et le braconnage demeurent des problématiques importantes.

Le secteur de la pêche est le premier secteur de l’économie nationale pourvoyeur de devises étrangères (environ 200 milliards de FCFA de recettes générées par an, soit 30% des recettes totales d’exportation), d’emplois (environ 600 000 personnes, soit 15% de la population totale active) et de protéines animales (satisfaction de 75% des besoins de la population nationale). Le sous-secteur de la pêche artisanale est à l’origine de plus de 80% de la production nationale (350 000 tonnes). Ce secteur se caractérise pourtant depuis quelques années par un contexte de forte pression entraînant la surexploitation des principaux stocks halieutiques.

En termes de stratégies, le Sénégal a mis en œuvre de nombreuses initiatives tant pour le contrôle des espèces exotiques envahissantes que pour l’exploitation durable des espèces sauvages.

Au niveau des espèces exotiques envahissantes, la réponse prend plusieurs formes, notamment avec la collaboration avec les scientifiques. Des institutions de recherche tel que l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, avec l’appui de bailleurs financiers ont développé des stratégies de contrôle du Typha via le développement d’énergies vertes. La réponse face au Typha inclut également des actions directes à l’endroit des communautés. En effet, les 8 villages à la périphérie du Parc National des Oiseaux de Djoudj ont été accompagnés pour des actions de lutte contre ces espèces. Le programme incluait la gestion durable des espèces sauvages ; la valorisation des espèces de poisson et leur exploitation durable ; la gestion des végétaux aquatiques envahissantes. Un autre pan de la réponse face aux espèces exotiques envahissantes, concerne la valorisation. Le typha est utilisé pour la confection de nattes. Aussi la fabrication de briques typha en combinaison avec l’argile qui servent à la construction de bâtiments écologiques.

Des ingénieurs sénégalais ont pensé utiliser cette plante comme matériau d’isolation thermique dans la construction de bâtiments bioclimatiques comme cela se fait déjà dans les pays développés. Ces nouvelles constructions rafraichissent l’intérieur des habitations et évitent ainsi l’utilisation excessive de ventilateurs et climatiseurs.

Dans le secteur du BTP (bâtiment et travaux publics), le Typha est utilisé pour la fabrication de briques. Au centre de transformation de Diamniadio, on peut déjà observer des prototypes d’habitat avec des briques de typha. Mélangé à de l’argile ou à du ciment, la brique de typha a tout d’écologique. Elle est solide, elle s’adapte aux changements climatiques (maisons plus fraiches en temps de chaleur, et chauffé par température froides).

Une des stratégies phare contre la surexploitation des ressources halieutiques est la politique de création d’aires marines protégées, en tant qu’outil de gestion durable de la pêche, initié au Sénégal depuis 2004. Le Sénégal compte 16 Aires Marines Protégées (AMP).

Le mode de gestion a évolué, l’Etat n’est plus seul, c’est maintenant une gestion collaborative avec les savoirs, les acquis et connaissances des communautés sur les AMP qui sont jugées utiles. La réglementation au sein des communautés est assez rigoureuse. Les communautés ont des chartes d’utilisation pour les ressources halieutiques avec des périodes de repos biologique avec des interdictions par période. Le dispositif est suivi par les conseils locaux pour la pêche artisanale qui inclut l’administration territoriale, la direction des pêches et des AMP et les différentes communautés de pêche, ce qui renforce le respect des règles. De nouvelles mesures très fermes pour l’octroi de licence de pêche industrielle sont en vue, afin que les attributions soient faites de façon inclusive avec tous les acteurs pour une gestion plus durable.

Bien que des réponses soient apportées, des défis demeurent pour trouver des solutions plus inclusives. Par exemple en termes d’évidences scientifiques et de chiffrages des impacts des espèces exotiques envahissantes sur la diversité du peuplement de poisson et par conséquent sur l’économie de cette zone humide du delta du fleuve Sénégal. Au-delà de l’utilité pour les communautés, les menaces sur les espèces migratrices dans la réserve de biosphère transfrontière du delta du fleuve Sénégal sont aussi d’intérêt.

Aire du Patrimoine Autochtone et Communautaire - APAC : Cas de gestion inclusive des écosystèmes marins et côtiers au Sénégal

Les aires du patrimoine communautaires autochtones (APAC) sont des aires de conservation des écosystèmes marins et côtiers délimités par les communautés elle-même. Elles décident de façon collégiale des types d’engins de pêche, des périodes de pêches, du partage équitable des bénéfices, etc.  L’APAC de KAWAWANA en basse Casamance, première du genre au Sénégal, englobe une aire côtière et maritime de 9 665 hectares, entièrement gouvernée, gérée et conservée par les communautés locales. L’APAC de KAWAWANA est née de la volonté des pêcheurs locaux de protéger leur territoire et source de vie, face à la surexploitation des ressources halieutiques. Par leur gestion, l’organisation est parvenue en 10 ans à la restauration d’une biodiversité disparue, en trouvant un équilibre entre les besoins des pêcheurs et la conservation de la vie sauvage. En plus de l’aspect communautaire, l’APAC de KAWAWANA s’appuie également sur les scientifiques avec un partenariat avec l’Université Assane Seck de Ziguinchor.Les réussites de cette gestion communautaire au niveau de KAWAWANA ont créé l’émulation au sein des autres communautés concernant la nécessité de gérer durablement les ressources halieutiques. Le Sénégal comptait 26 APAC en 2022.