RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO
PRÉSENTATION DU PAYS
Superficie : 2 344 858 km2
Population : 105 625 114 habitants
Principaux secteurs économiques : forêts, mines, agriculture.
Principaux écosystèmes : forêts, savanes, eau douce, écosystèmes marins
LISTE DES PARTICIPANTS
- M. Kikuni Daniel MUKUBI, Ministère de l'Environnement et Développement Durable | dannymukubi@gmail.com
- Pr. Mylor NGOY SHUTCHA, Université de Lumumbashi | mylorshutcha@gmail.com; mylor.ngoyshutcha@unilu.ac.cd
- Mme Rachel NYABORANZI, Ministère de l'Environnement et Développement Durable | nyaboranzi@gmail.com
- Mme Chantal SHALUKOMA, Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN) | chantalshalukoma@gmail.com
- Dr. Benjamin NCANGU BAHINDWA, Université Officielle de Bukavu | r.djanys@gmail.com
La République Démocratique du Congo (RDC) est située au cœur du Bassin du Congo, classée parmi les pays au monde les plus méga-diverse.
Les écosystèmes forestiers représentent 10% des forêts tropicales mondiales, près de 50% des forêts tropicales africaines et 62% des forêts du Bassin du Congo.
Les biens et services écosystémiques contribuent au bien-être de la population congolaise, dont 70% vivent en milieu rural.
La propagation des espèces exotiques envahissantes n'est ni facile à gérer, ni à inverser, menaçant non seulement la biodiversité mais aussi le développement économique et le bien-être humain.
Les espèces exotiques envahissantes, les activités anthropiques non réglementées, la surexploitation des ressources naturelles, le changement climatique, la pollution, la guerre et l'insécurité, le braconnage, la gouvernance inadéquate de l'utilisation des ressources, le commerce transfrontalier des espèces sauvages, constituent des menaces importantes pour la biodiversité et la conservation durable des espèces sauvages.
En RDC, les espèces exotiques envahissantes constituent une menace majeure pour la biodiversité, comme en témoigne la liane Sericostachys scandens dans le parc national de Kahuzi Biega. Cette espèce affecte la photosynthèse des arbres les détruisant. Elle provoque la déforestation, empêche les oiseaux de nicher et perturbe les habitats des singes, d'autres espèces et des éléphants.
Les espèces animales et les insectes exotiques envahissants peuvent s'attaquer à la faune, provoquer des maladies et agir comme vecteurs de maladies, ce qui rend très difficile l'utilisation durable de la faune et de la flore. Le rapport de l'IPBES (2023) a également souligné que l'émergence de zoonoses est liée aux espèces exotiques envahissantes, qui peuvent avoir des impacts significatifs sur la santé humaine.
La jacinthe d'eau constitue une autre menace pour la biodiversité. Elle réduit les nutriments aquatiques, supplante les plantes aquatiques indigènes, entrave la navigation, empêche la pénétration de la lumière du soleil et perturbe les frayères. En outre, le tournesol mexicain (Tithonia diversifolia) est considéré comme problématique dans certaines zones agricoles et naturelles de la RDC, car il supplante et déplace les espèces végétales indigènes, entraîne une perte de fertilité des sols, ce qui conduit à une faible production agricole et à l'insécurité alimentaire. Les espèces exotiques envahissantes sont identifiées comme l'une des causes de la faible productivité agricole. Cette situation a contraint les communautés à se réfugier dans la forêt à la recherche de nourriture, ce qui a entraîné une augmentation des pressions exercées par le braconnage.
D'après les entretiens avec les informateurs clés, les moteurs de l'introduction des espèces exotiques envahissantes et de la faune sauvage non durable sont principalement la colonisation - l'arrivée des réfugiés rwandais en 1994, le commerce international et le transport, la conversion des terres pour l'agriculture, l'urbanisation et le changement climatique, le commerce mondial des espèces sauvages, la chasse illégale, les conflits et la culture.
Les principaux défis liés à la lutte contre les espèces exotiques envahissantes et à l'utilisation durable de la faune sauvage en RDC sont les suivants :
Sensibilisation et lacunes en matière de connaissances : Le manque de sensibilisation des communautés, des universités et des ministères aux impacts des espèces exotiques envahissantes constitue un obstacle important à une gestion et une prévention efficace
L'insuffisance de l'expertise technique, de la disponibilité et/ou de l’accès aux données et de la recherche scientifique sur les espèces exotiques envahissantes et les espèces sauvages entrave la prise de décisions fondées sur des données probantes.
Faiblesse institutionnelle et réglementaire : Les capacités limitées du gouvernement en termes de ressources humaines, d'outils d'inspection et de capacités de mise en œuvre sapent les efforts de mise en œuvre. L’insuffisance des ressources financières, des capacités institutionnelles et de la volonté politique entrave l'application efficace des politiques et réglementations existantes.
Les cadres juridiques et réglementaires obsolètes, tels que la loi sur la chasse de 1982, sont incapables de relever les défis contemporains liés aux espèces exotiques envahissantes et à la conservation de la faune sauvage.
Pressions socio-économiques : L'augmentation rapide de la population a rendu les anciennes pratiques de conservation de la faune et de la flore non viables, ce qui a entraîné des conflits d'intérêts et une utilisation non durable des ressources.
La pénurie de terres et les conflits sociaux dans les zones septentrionales entraînent des migrations vers d'autres provinces, augmentant la pression sur les ressources et contribuant aux problèmes de gouvernance.
L'inégalité entre les sexes limite la participation des femmes à la gestion des espèces exotiques envahissantes et à la prise de décision concernant les ressources, ce qui entrave l'intégration de leurs connaissances écologiques locales, contribuant ainsi de manière déterminante à la perte de biodiversité.
Actions stratégiques complémentaires :
Mise à jour des politiques et prise de mesures appropriées dans les lois et les règles de gestion, gestion adaptative, y compris la restauration des écosystèmes,
Base de données des espèces exotiques envahissantes au niveau national, promotion des processus de prise de décision incluant le genre pour une conservation efficace des espèces exotiques envahissantes et de la faune sauvage et un changement transformateur en RDC.
La prévention est la meilleure option, mais la détection précoce, l'éradication, le confinement et le contrôle sont également efficaces dans des contextes spécifiques. Les droits fonciers et les droits sur les ressources peuvent contribuer à l'utilisation durable, l'équité, les droits et la distribution équitable des bénéfices sont essentiels pour garantir l'utilisation durable des espèces sauvages.
Point fort : Tirer parti des pratiques traditionnelles pour une gestion durable des forêts en RDC
La RDC abrite la deuxième plus grande forêt tropicale du monde, couvrant environ les deux tiers du pays. De nombreuses communautés indigènes de la RDC ont développé des pratiques traditionnelles durables pour utiliser les ressources forestières sans les épuiser. L'une des principales pratiques est l'agriculture itinérante sur brûlis : les communautés défrichent et cultivent de petites parties de la forêt, puis laissent ces zones en jachère et se régénèrent avant d'y retourner. Cela permet à la forêt de se reconstituer naturellement et de maintenir l'équilibre écologique. Une autre méthode traditionnelle est l'abattage sélectif, qui consiste à ne récolter que certains arbres matures pour le bois d'œuvre ou de chauffage, plutôt que de couper à blanc des zones entières. Cette méthode permet de préserver la structure générale de la forêt et sa biodiversité.
Point fort : Les espèces exotiques envahissantes menacent le rituel du Kimbilikiti en RDC
Le Kimbilikiti, un rituel communautaire pratiqué dans la région du Maniema en République démocratique du Congo (RDC), interdit périodiquement la chasse et l'agriculture dans les forêts et les sites sacrés pendant 6 mois à 1 an, ce qui permet la régénération naturelle de la forêt, comme le déterminent les chefs coutumiers locaux. Ce système traditionnel de gestion des ressources montre comment les communautés autochtones ont développé des pratiques durables pour protéger la biodiversité et les services écosystémiques essentiels au bien-être humain. Cependant, la propagation d'espèces exotiques envahissantes telles que la liane Sericostachys scandens et la jacinthe d'eau menace désormais de saper le Kimbilikiti et les écosystèmes qu'il est censé protéger. Relever le défi des EEE tout en soutenant la résilience de cette institution et d'autres institutions de gestion des ressources indigènes sera vital pour maintenir le bien-être environnemental et humain dans toute la RDC.
Point fort : Réduction par l'utilisation : Fabrication d'objets artisanaux à partir de la jacinthe d'eau.
En RDC, certaines communautés utilisent la jacinthe d'eau comme matière première pour créer divers produits artisanaux tels que des paniers, nattes, chapeaux, colliers, bracelets, bijoux, sacs à main, ceintures et articles décoratifs et accessoires de mode. Il s'agit d'une opportunité économique de transformer une espèce envahissante en produits de valeur. Un soutien scientifique et une formation des communautés locales sont nécessaires pour garantir que la récolte et la transformation de la plante se fassent de manière durable, afin de ne pas exacerber les problèmes environnementaux causés par sa proliferation.
Point fort : Impacts sexospécifiques de l'expansion de l'eucalyptus dans le Sud-Kivu, RDC
Dans la région du Sud-Kivu, en RDC, l'expansion des plantations d'eucalyptus est motivée par le pouvoir de décision prioritaire des hommes en matière d'utilisation des terres, ce qui entraîne l'empiètement de ces plantations sur les champs agricoles gérés par les femmes. Les activités agricoles des femmes s'en trouvent considérablement perturbées, car les plantations d'eucalyptus réduisent les terres disponibles, dégradent la fertilité des sols et limitent les possibilités d'emploi pour les femmes. Ce cas met en évidence les déséquilibres entre les sexes dans la gestion des ressources naturelles, où les perspectives et les intérêts des femmes sont souvent marginalisés. Pour résoudre ce problème, il faut promouvoir une prise de décision inclusive, évaluer les impacts différenciés selon le sexe, développer des stratégies d'atténuation équitables et renforcer les droits fonciers des femmes afin de garantir une approche plus durable et socialement plus juste de l'utilisation des terres dans la région.
Point fort : L'eucalyptus, une alternative pour la préservation des forêts au Kivu-RDC.
Dans la partie nord du Nord-Kivu, en RDC, la couverture forestière naturelle a été largement remplacée par un paysage dominé par des plantations d'eucalyptus, qui sont devenues la principale source d'énergie ligneuse et de bois d'œuvre pour les communautés locales. Ces espèces d'arbres exotiques ont été préférées à la végétation indigène, car elles offrent d'importants avantages socio-économiques, notamment comme source de combustible pour les ménages et les petites industries, ainsi qu'une valeur médicinale et culturelle. Toutefois, ce reboisement en eucalyptus dépasse l'utilisation des terres agricoles et pastorales dans la région, ce qui soulève des questions quant à la durabilité à long terme et à l'impact écologique de cette transformation, car les plantations en monoculture peuvent être dépourvues de la biodiversité et des services écosystémiques fournis par les forêts naturelles. Compte tenu de la multiplicité des vertus reconnues de l'eucalyptus, la question est de savoir si l'eucalyptus constitue une alternative à la forêt naturelle au Kivu. Un autre problème est la demande en eau de l'eucalyptus, qui a été accusé d'être à l'origine de la disparition des palmeraies de raphia dans de nombreuses régions d'Afrique (Dagar et al. 2020).